Cancer colorectal métastatique KRAS G12C : Inhibiteurs actuellement disponibles en essai thérapeutique

Environ 40 % des cancers colorectaux métastatiques (mCRC) présentent des mutations du gène KRAS, généralement dans l’exon 2 et dans les codons 12 (80 % des cas) et 13, moins fréquentes dans les exons 3 (codons 59 et 61) et 4 (codons 117 et 146). Les mutations du gène NRAS sont rares (5 à 10 % des cas de CRC) et se produisent principalement dans les exons 3 (codon 61) et 2 (codons 12 et 13). Longtemps, les différentes mutations KRAS ont été considérées comme équivalentes sur l’absence de réponse aux traitements anti-EGFR (récepteur du facteur de croissance épidermique). Cette constatation a rapidement changé et s’est affinée ces dernières années suite à la découverte du ciblage possible de KRAS G12C de manière sélective, mutation présente dans 2 à 4 % des mCRC.

L’activité antitumorale du sotorasib a été évaluée dans l’étude de phase I CodeBreaK 100, qui a inclus des patients avec une tumeur KRAS G12C lourdement prétraitée, dont une cohorte de 42 patients ayant un mCRC. Parmi eux, 3 patients (7,1 %) ont présenté une réponse partielle (RP), et 31 patients (71,8 %) étaient stables. La survie sans progression médiane (SSPm) était de 4,0 (0,0-11,1) mois. La toxicité était acceptable avec essentiellement : diarrhée, fatigue et nausées. Dans la cohorte d’expansion de la phase II, ces résultats ont été confirmés chez 62 patients avec 10 % de RP, 73 % de stabilité et une SSPm de 4 (2,8-4,2) mois. La survie globale médiane (SGm) était de 10,6 (7,7-15,6) mois (Fatih et al. Lancet oncol 2022).

Le maintien de l’activation de l’EGFR en amont étant susceptible de réduire l’efficacité du blocage de KRASG12C, l’association d’un anticorps anti-EGFR à un inhibiteur de KRAS G12C a été considérée dans l’essai KRYSTAL-1 dont les résultats ont été présentés à l’ESMO 2022. L’adagrasib était évalué en monothérapie ou en association avec le cétuximab. Pour les patients traités par l’adagrasib en monothérapie, le taux de réponse objective était de 19 % (8 patients sur 43), le taux de contrôle de la maladie de 86 % (37 patients sur 43), la SSPm de 5,6 (4,1-8,3) mois et la SGm de 19,8 (12,5-23) mois. Chez les 28 patients traités par cétuximab+adagrasib, le taux de réponse objective était de 46 %, le taux de contrôle de la maladie de 100 %, la SSPm de 6,9 (5,4-8,1) mois et la SGm de 13,4 (9,5-20,1) mois (Kleppner et al. ESMO 2022).

Dans la cohorte d’expansion de dose de l’étude de phase Ib CodeBreaK 101, l’association du sotorasib avec le panitumumab a également été étudiée avec un taux de réponse objective de 30 % (12 patients sur 40), un taux de contrôle de la maladie de 93 % et une SSPm de 5,7 (4,2-7,6) mois (Kuboki et al. ESMO 2022).

Plus récemment, à l’ASCO 2023, le sotorasib à 960 mg/jour a été évalué en association au panitumumab et à une chimiothérapie par FOLFIRI dans une autre cohorte de l’étude CodeBreak 101 de phase 1b incluant 42 patients mCRC mutés KRAS G12C prétraités (lignes médianes antérieures médianes=2). Si le profil de tolérance observé correspondait aux attentes avec cette association avec un taux de toxicité grades 3-4 de 43 %, le taux de réponse objective était de 55 % et le taux de contrôle de la maladie de 93 %, indépendamment de l’exposition antérieure à l’irinotecan (Hong et al, ASCO 2023).

Plusieurs essais thérapeutiques évaluant les inhibiteurs de KRAS G12C sont actuellement en cours dans plusieurs tumeurs solides. Deux essais concernent exclusivement les cancers colorectaux métastatiques KRAS G12C mutés : l’étude de phase III randomisée CodeBreak 300 qui évalue une association sotorasib+panitumumab par rapport à un traitement au choix de l’investigateur chez des patients prétraités par chimiothérapie (irinotecan, oxaliplatine, 5 FU) et l’étude de phase III KRYSTAL-10 qui compare une association adagrasib+cétuximab versus FOLFOX ou FOLFIRI en 2ème ligne de traitement.